RAPPORT DE 2EME TRIMESTRE 2022

Rapport du 2eme trimestre et début du 3eme de l’année scolaire
2021-2022
A Fana le deuxième trimestre s’est bien passé à l’école et c’est l’avant dernier
round de nos candidats avant les examens.
C’est aussi l’occasion de bien préparer les évaluations trimestrielles pour les
autres.
Nous avons une saison sèche très chaude et un retard des vaccinations. En effet,
les rappels de vaccin n’ont pu être fait à cause du covid (les gens ne fréquentent
plus les centres de santé car ils ont peur du covid) et plusieurs maladies se sont
propagées dont une épidémie de rougeole, une maladie mortelle en Afrique très
crainte par les familles.
Et pourtant les enfants étaient vaccinés et cela nous a profondément interpellé
sur l’efficacité et la nécessité de se faire vacciner. J’étais arrivé d’urgence de
Gao pour les assister jusqu’à leur guérison ça a duré une semaine et ça se
termine par des boutons rouges sur tout le corps.
Nous remercions Dieu tout le monde s’en ai bien sorti plus de peur que du mal.
Après cette épreuve tout le monde a repris le chemin de son école et moi j’ai eu
une place dans un avion des Nations-Unis pour Gao, delà je continu sur Ag
Infanana jusqu’à la fin de l’année scolaire.
Mon pays va mal depuis le début de ce deuxième trimestre marqué par l’embargo
des pays de la CEDEO contre le Mali, suite à un coup de d’Etat par une junte
depuis plus d’un an. Le refus de cette dernière d’être claire pour proposer un
calendrier tenable et sérieux d’organisation d’élections crédibles pour permettre
un retour à l’ordre constitutionnel et un régime démocratique.
Par une vague des jeunes désoeuvrés en quête de bouc émissaire à leurs
conditions, se sont constitués en soutien de la transition et sont mis à son
service. Ils ont formé un mouvement anti-français et ensuite un pro-Russe qui a
très vite pris des tournures propagandistes inimaginables et démesurées.
Il y a d’abord le renvoi de l’ambassadeur de France au Mali, le départ de
l’opération barkhane et la force européenne Takouba. En suite la suspension puis
le retrait d’exploitions de la radio RFI et de la télévision France 24 du Mali, ces
deux médias que nous écoutions et auprès desquels nous nous informons de ce qui
se passe chez nous et ailleurs.
Les populations du nord n’ont pas été associées à toutes ces grandes décisions de
la nation, elles n’ont pas été concertées mais restent très concernées par la
suite.
Une société de sécurité privée Russe appelée Wagner accompagne l’armée
malienne dans sa conquête des zones qui lui échappaient depuis des années.
Cette dernière a une très mauvaise réputation par rapport au respect des droits
humains, ce qui a été décrié et dénoncé par l’armée française qui est au courant
de ce qu’elle a commis comme bavures et exactions sur les civils en Centre-
Afrique et en Libye. Ce que nous redoutons est arrivé le 23 avril à Hombori où
les militaires maliens et leurs supplétifs Russes ont ouvert le feu sur des forains
un jour de foire, il y a eu plusieurs morts, arrestations arbitraires et des vols
des biens au marché appartenant aux victimes.
Au même moment et dans les environs à Gossi un charnier a été découvert par un
drone de l’opération Barkhane ce qui a donné lieu à des accusations mutuelles
entre l’armée française et l’armée malienne et ses supplétifs Russes à savoir qui
sont les auteurs de ce crime odieux. Encore aujourd’hui et peut être à jamais les
parents de ces victimes sont loin d’avoir la vérité sur ce qui est arrivé à leurs
proches.
C’était un trimestre noir au cours duquel des attaquent djihadistes cruelles et
très meurtrières sur les populations civiles vivants au centre et aux frontières
avec le Niger et le Burkina Faso, ce qui a provoqué un départ massif des
populations vers les grandes villes fuyant les campagnes.
Il en découle un très grand besoin d’aide humanitaire et l’effondrement des
économies rurales. Les foires hebdomadaires ne sont plus fréquentées et la
saison des cultures n’est pas préparée ce qui présage un déficit sur la récolte
prochaine.
Il y a aussi des sanctions économiques de fait à l’échelle international
importantes tel que le départ du Mali de FMI, de la Banque Mondiale, de l’AFD et
de la BOAD (banque ouest africaine de développement).
L’ironie du sort est que l’armée malienne laisse le terrain seul aux djihadistes,
car le Mali se retire de l’organisation sahélienne du G5-Sahel qui a été créée
pour lutter contre le terrorisme au Mali et au Sahel.
A Ag-Infanana nous ne sommes pas ni aux frontières ni au centre ni très éloignés
de la grande ville Gao. Nous avons la chance d’être épargnés. L’école et le
dispensaire fonctionnent parce que tenu par les jeunes du village qui vivent et
sont bien acclimatés de ces réalités.
C’est une année de grande sècheresse et on n’est jamais prêt, on savait que tous
les dix ans il y a une grande sécheresse cyclique au sahel et Sahara ; ce qui doit
tomber sur cette année. Cela ne s’arrange pas, le dérèglement du climat qui passe
de grandes sécheresses aux grandes pluies diluviennes avec leurs lots de
catastrophes seront malheureusement de plus en plus fréquentes.
C’était aussi le début la guerre Russo-Ukrainienne qui est loin de nous mais ces
conséquences sur notre économie sont très vite arrivées. Les denrées
alimentaires à base du blé et les hydrocarbures ont pratiquement tiré tous les
autres produits de première nécessité à la hausse. Nous avons passé un ramadan
chaud et long, les fêtes sont moins colorées que d’habitude car tous ces
problèmes mis bout à bout impactent sévèrement notre pouvoir d’achat. Les
priorités sont survivre et dépasser cette dure épreuve qui menace nos libertés
et indépendance : la raison de notre existence.
Je retournerai début juillet à Bamako, j’ai mon rendez-vous pour le visa au
consulat le 19 du même mois et si tout va « bonjour mes amis de France à partir
du 23 août jusqu’au 05 octobre 2022 ».
« Ce n’est pas par ce que c’est difficile qu’on abandonne mais c’est justement
pour cette raison que l’on redouble d’effort et de courage »
Ibrahim Ag Assarid
Directeur de l’école des sables